dimanche 17 mai 2015

Dessiner comme ses pieds...

Alors qu'il suffit de quelques heures pour le faire avec ses mains et quelques conseils techniques...

Diaporama des dessins techniques des élèves


dimanche 10 mai 2015

Camouflé dans le décor

Exposées depuis 1992 au Château d’Oiron, les œuvres de Claude Rutault, nommées « Définitions/méthode » sont caractérisées par une toile de forme basique peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est exposée.
Ce phénomène de camouflage créée une cohabitation entre l’œuvre et son support , dont l’uniformité interroge le spectateur sur la réelle nature de l’œuvre, qui dépasse les notions de représentation habituelles ( figuration d'un élément, abstraction du réel...).

Claude Rutault –Salle des plates peintures, œuvre du corpus « Définitions/méthode » (1992) 
–Château D'Oiron, chambre du roi

Proche du groupe artistique «  Support/Surface » Rutault reprends à sa manière leur manifeste : « L’objet de la peinture, les tableaux exposés n’offrent point d’échappatoire, car la surface, par les ruptures de formes et de couleurs qui y sont opérées, interdit les projections mentales ou les divagations oniriques du spectateur.  Il ne s’agit pas de la recherche d’une pureté originelle, mais de la simple mise à nu des éléments picturaux, d’où la neutralité des œuvres présentées ».


Kasimir Malevitch – Carré Blanc sur Fond Blanc (1918)
 – Musée d'Art Moderne NY
Rutault évacue alors la subjectivité du geste de l’artiste au profit de l’indépendance de l’œuvre, contrainte par son seul environnement. Cette démarche extrême de neutralité , renouvelant les codes artistiques du monochrome, dépasse celle de Malevitch.
Par exemple, Carré Blanc sur Fond Blanc reflète une démarche radicale entre l'absence totale de figuration et d'abstraction, où l'artiste privilégie ainsi la matière, le format et le support de l’œuvre

Bérénice Richard. 1L






Par ailleurs, la sobriété de l’œuvre de Rutault, installée dans "la chambre du roi" pourrait sembler en apparente opposition avec l'abondance des décors d'origine.
Cependant, cette rupture  n'est pas dénuée de sens et s'articule avec l'architecture de manière inattendue.
Par la similitude  stylistique que ces décors entretiennent avec les décors de la salle voisine, le "cabinet des muses", le spectateur trouve une certaine continuité entre les deux espaces.
Or, cette continuité est plus grande qu'il le croit, puisque là encore, la peinture joue au camouflage avec les murs, et dissimule une porte dérobée, qui dessert un espace caché et commun aux deux salles.

Salle des muses
 
Chambre du roi






















Mise à nu et surabondance décorative s'opposent et se rejoignent alors dans un même questionnement sur la peinture, comprise, quelle qu’en soit la définition, comme un artifice, une illusion, qui interroge les relations entre l'espace du spectateur et l'espace architectural. 


samedi 9 mai 2015

Vaincre les lois de la gravité, ou la photographie des fausses apparences



Lévitation rationnelle. Philippe Ramette. Château de Oiron.

Cette photographie, aux premiers abords, trouble le spectateur.
Photographie? Sculpture? Performance?

Philippe Ramette est un artiste (sculpteur, photographe et dessinateur) qui aime défier les lois de la logique, à travers celle de la gravité.
Il réalise des installations surréalistes dans lesquelles il met en scène son propre corps, dans des postures improbables et illogiques, grâce à ses prothèses, sculptures d'objets hybrides insolites, qui permettent d'appréhender le monde selon un autre point de vue.
Dans ses images, il n'y a aucune trucage photographique, aucune retouche numérique!
Cela parait incroyable. Mais c'est justement cette sensation de mystère, palpable dans la tension du corps de l'artiste photographié, que Philippe Ramette cherche à créer, en tant que moteur du regard contemplatif du spectateur.
“Bien sûr, on pourrait faire une manipulation numérique, mais ce qui m’intéresse, c’est ce paradoxe : la rationalité effective de ces images" -qui paraissent irrationnelles-
La performance acrobatique et la mise en situation concrète de ses prothèses, créent un décalage du regard, qui désarçonne le spectateur et l'oblige à inventer une nouvelle façon de regarder le monde.
La photographie n'est cependant pas documentaire, mais constitue l’œuvre d'art finale, intrigante comme une énigme à résoudre, qui joue sur l'absurde.
La photographie est le prolongement des démarches artistiques précédentes (sculpture, mise en situation performative), qu'elle englobe dans son processus de création et qu'elle rend invisible, tout en étant le garant de leur existence, sans lequel elles perdraient toute signification.

Ce phénomène questionne la nature de l’œuvre d'art, en faisant exploser les frontières entre processus créatif et objet final.
Une oeuvre disparait pour en produire une autre, dans laquelle elle reste présente!

Philippe Ramette. Balcon 2 (Hong Kong). 2001
Philippe Ramette. Contemplation irrationnelle. 2003





















Cette volonté délibérée d'intriguer le regard du spectateur en jouant avec la gravité est une marque de fabrique que l'on retrouve dans les travaux du collectif de designers et photographes japonais NAM.

Cependant, ici, la démarche est une approche esthétisante et artificielle du chaos, stoppé dans son mouvement par un arrêt sur image volontairement faux, mais d'une beauté idéale - parfaite pour une image de publicité-.

Face à la problématique du vrai et du faux, de la crédibilité rationnelle d'une représentation, la question du statut de la photographie est donc ici également posée.
Entre art fondamental et art appliqué, cette image, à la mise en scène visiblement truquée mais d'une maitrise de retouche numérique parfaite, renverse la logique du regard du spectateur, non seulement sur le monde qui nous entoure, à travers la modification de la gravité, mais aussi sur les codes techniques et esthétiques de la photographie.

Une façon détournée d'interroger les apparences et les paradoxes de l'art et de la société.

Collectif NAM. Panic room. 2012


D'après l'article de Caroline Charbonneau. Classe de première.