Exposées
depuis 1992 au Château d’Oiron, les œuvres de Claude Rutault,
nommées « Définitions/méthode » sont caractérisées
par une toile de forme basique peinte de la même couleur que le mur
sur lequel elle est exposée.
Ce
phénomène de camouflage créée une cohabitation entre l’œuvre
et son support , dont l’uniformité interroge le spectateur sur la
réelle nature de l’œuvre, qui dépasse les notions de
représentation habituelles ( figuration d'un élément, abstraction
du réel...).
Claude
Rutault –Salle des plates peintures, œuvre du corpus « Définitions/méthode »
(1992)
–Château D'Oiron, chambre du roi
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Proche
du groupe artistique « Support/Surface » Rutault
reprends à sa manière leur manifeste : « L’objet de
la peinture, les tableaux exposés n’offrent point d’échappatoire,
car la surface, par les ruptures de formes et de couleurs qui y sont
opérées, interdit les projections mentales ou les divagations
oniriques du spectateur. Il ne s’agit pas de la recherche
d’une pureté originelle, mais de la simple mise à nu des éléments
picturaux, d’où la neutralité des œuvres présentées ».
Kasimir
Malevitch – Carré Blanc sur Fond Blanc (1918)
– Musée d'Art
Moderne NY
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Rutault
évacue alors la subjectivité du geste de l’artiste au profit de
l’indépendance de l’œuvre, contrainte par son seul environnement. Cette démarche extrême de neutralité , renouvelant les codes artistiques du monochrome, dépasse celle
de Malevitch.
Par
exemple, Carré Blanc sur
Fond Blanc reflète une
démarche radicale entre l'absence totale de figuration et
d'abstraction, où l'artiste privilégie ainsi la matière, le format
et le support de l’œuvre
Bérénice Richard. 1L
Par ailleurs, la sobriété de l’œuvre de Rutault, installée dans "la chambre du roi" pourrait sembler en apparente opposition avec l'abondance des décors d'origine.
Cependant, cette rupture n'est pas dénuée de sens et s'articule avec l'architecture de manière inattendue.
Par la similitude stylistique que ces décors entretiennent avec les décors de la salle voisine, le "cabinet des muses", le spectateur trouve une certaine continuité entre les deux espaces.
Or, cette continuité est plus grande qu'il le croit, puisque là encore, la peinture joue au camouflage avec les murs, et dissimule une porte dérobée, qui dessert un espace caché et commun aux deux salles.
Salle des muses |
Mise à nu et surabondance décorative s'opposent et se rejoignent alors dans un même questionnement sur la peinture, comprise, quelle qu’en soit la définition, comme un artifice, une illusion, qui interroge les relations entre l'espace du spectateur et l'espace architectural.